Samuel CabironLAURÉAT DU PRIX DE LA JEUNE ARCHITECTURE DE LA VILLE DE LYON CATÉGORIE ARCHITECTURES LATÉRALES THÉORISÉES
Mes motivations pour l’architecture Des souvenirs, oui. Ou plutôt des émotions, aussi naïves soient-elles, qui surgissent comme des occasions de façonner son environnement tel un magicien. Peut-être par les premiers assemblages de simples legos, émerveillé par la construction de vaisseaux spatiaux ou de tours infinies qui prennent vie. Ou peut-être, agenouillé devant le poste de télévision, pour découvrir avec surprise et fascination des récits aussi loufoques qu’enchantants, à travers la villa Arpel de Jacques Tati, ou encore la fabuleuse usine de chocolat de Willy Wonka. Ou aussi, sans doute, par l’étrange métamorphose de ma maison d’enfance, où par d’anciens murs vieillissants, apparaissent de nouvelles fenêtres. Comme si, d’un simple coup de baguette pour y apporter la lumière, un magicien était passé par là. Et qu’à mon tour, je veuille moi aussi élaborer mes propres numéros. Mon projet de fin d’études Véritable exploration où il faut se savoir se laisser dériver sans boussole et chronomètre, la dernière année s’est présentée comme une porte ouverte vers des imaginaires. Née d’une volonté de raconter avec délicatesse ce que signifie “être architecte”, le diplôme de fin d’études est une cristallisation des différentes expérimentations élaborées au cours du cursus. L’intérêt pour la simplicité, le dessin et l’imaginaire s’est présenté comme une opportunité de mettre mes idées à l’épreuve et de questionner ma façon de percevoir le monde qui m’entoure. De me demander avec une certaine sincérité si l’architecture est vraiment “le jeu savant, correct et magnifique des volumes sous la lumière.” ? Et après ? L’architecture est art de concevoir dans le but d’une édification. De ce processus créatif, presque intuitif, naissent l’envie et le besoin de proposer des promenades d’architectures. Alors que l’architecture s’intéresse au “où” et au “pourquoi”, les histoires, elles, dialoguent avec le “quoi” et le “pourquoi”. Alors, à quoi bon construire, puisque les livres, la gravure d’hier, le cinéma et le roman graphique aujourd’hui, sont là pour conserver, pour un regard qui voit, mais au-delà des choses, là, où les formes naissent et viennent s’articuler ? L’architecture n’oubliera pas l’œuvre d’art qu’elle est pour s’intégrer au monde moderne, du papier à l’écran, du jeu vidéo à la série, et de la maquette à l’objet. Il faut être moderne, disait Rimbaud, et accepter que sous les habits du projet, s’exprime la vérité d’une recherche. Que, certes la plupart des ingénieurs ne pourront peut-être pas exploiter, mais accepteront qu’à d’autres besoins correspondent d’autres types et que les projets soient des lieux d’invention, accueillants à qui vient et libre de se promener. Des bâtiments bien sûr, mais infiniment légers et dont la matérialité disparaîtrait, donnant raison à ceux pour qui la brique, même nue, ne pourrait être qu’une étape où la structure des choses et leurs frémissantes mécaniques seraient libres de s’exprimer. Bien sûr, il y a l’idée que ces mêmes bâtiments pourraient être oubliés. D’où l’obligation où l’on serait soudain de ne rien ajouter à ce qui existe déjà, et que l’extraordinaire richesse des fictions architecturales produit certes du réel, mais abrite aussi des projets imaginaires. |