Adriaen Mejia RiosLAURÉAT DU PRIX DE LA JEUNE ARCHITECTURE DE LA VILLE DE LYON CATÉGORIE ARCHITECTURE ALTERNATIVE, STRATÉGIES ET PRATIQUES ÉMERGENTES
C’est à mon septième tour de soleil que je décide de devenir architecte, dans l’espoir de rayonner un jour comme mon père, éteint à l’aube du 21e siècle. À l’époque, à part le fait de “dessiner des maisons” je ne connais rien de ce métier. Rien de tel que l’adolescence pour remettre en question des décisions prises dans l’enfance et je mets finalement cette idée de côté. Ébloui par l’envie de me créer ma propre identité, je me renseigne sur tous les domaines mais rien ne m’inspire. Ma mère, elle, m’éclaire en me disant de faire ce que j’aime. J’aime écrire et dessiner, la politique et la physique, la nature. Je réalise alors que j’adore déjà l’architecture. Je doute toujours, mais c’est peine perdue cette fois, cette décision naît d’une seconde foi : l’architecture brillera autant pour l’esprit du fils que pour l’aura du père. C’est lors de mon troisième tour de soleil à l’école, que mes souvenirs y atteignent leur zénith, juste avant mon envol pour le Brésil. On (re)connaît presque tout le monde, l’approche de l’échange universitaire nous motive et on veut savourer au maximum nos derniers instants ensemble. Je me souviendrai toujours de cette charrette en atelier licence : toute notre bande d’ami(e)s était là, on avait apporté à manger et de quoi écouter de la musique pour se motiver et s’entraider toute la nuit. Ce sont toutes ces lueurs collectives que génèrent les études d’architecture qui illuminent ces années. Mais tant d’autres moments scintillent encore. Des pique-niques sur l’amphi de verdure aux siestes-amphithéâtre sur les tables toutes dures ; des soirées Flamant rose aux festivals Archisound ; du sprint matinal jusqu’au 57 avec l’espoir de s’asseoir aux enivrants sifflements de Jean-Yves à 19h45 le soir. En rentrant de São Paulo, imprégné d’une culture et d’une vision politique de l’architecture, j’entame mon mémoire ainsi que mon projet de fin d’études. Ils rassemblent mes inspirations académiques autant que mes aspirations professionnelles. Armenia Mantequilla, mon village en Colombie, est un condensé de ce qu’est le pays : une richesse abondante mais une précarité constante pour la majorité de sa population. “La Maison de l’Autoconstruction” que nous allons bâtir, favorisera l’autonomie constructive en terre crue/bambou de cette communauté rurale que la globalisation capitaliste oublie depuis toujours. Je prépare maintenant la candidature d’un doctorat en partie basé sur ce PFE et c’est entre ville et village que j’aimerai exercer, comme catalyseur de créations émancipatrices. Je veux être un architecte-paysan. Aujourd’hui j’entame mon premier tour de soleil en tant qu’architecte et aux aurores de ma pratique professionnelle, je remercie celles et ceux qui ont permis ce crépuscule académique : mon père, John Jairo, ma mère Luz Marina, ma soeur Paloma, mon frère Daniel Esteban ainsi que toute ma famille colombienne. Mes ex-colocataires Bart, Julie et Pauline. Mes ami.e.s de Perrache, de la Ratatouille et du Brésil. Mes directrices de mémoire et de stage Estelle Morlé et Sandra Fiori, mon directeur de PFE William Vassal ainsi que mon mentor - et ancien directeur de TPFE de mon père à l’ENSAL - Claude Hourcade. Et bien sûr les paysan.ne.s de Guanacas & d’Armenia Mantequilla. À toutes et tous j’envoie mes meilleures énergies et leur souhaite, ce que chaque année la Terre réalise autour du Soleil : une révolution. |