Anouk LanderbalLAURÉATE DU PRIX DE LA JEUNE ARCHITECTURE DE LA VILLE DE LYON CATÉGORIE ARCHITECTURE, HÉRITAGE ET DURABILITÉ
Je remercie en premier lieu, Albert Camus, écrivain qui, à travers sa description aiguisée du paysage marin dans La Mer au plus près, m’a permis de mettre des mots sur l’imaginaire de mon PFE et qui, ici, me permet d’aborder l’exercice de l’écriture. I “Un matin, les vagues viennent de l’Est invisible, une à une, patiemment, repartent vers l’Ouest inconnu, une à une. Long cheminement, jamais commencé, jamais achevé…” L’aventure commence par l’accumulation, pendant 17 ans, d’expériences spatiales diverses : le tournoiement expressif, physique et rigoureux de la danse classique, le fourmillement de l’imaginaire à travers des paysages littéraires, l’apaisement de contempler la mer, l’aiguisement de la curiosité pour le monde architecturé, au gré de voyages… Les unes après les autres, se recouvrant, se superposant, elles me portent en 2013 jusqu’à l’horizon de l’architecture, tout aussi attrayant qu’effrayant, chemin inconnu, qui ne semble pas montrer de fin. II “Les eaux gémissent et se convulsent. Le jour se lève sur une mer houleuse, pleine de paillettes d’acier.” Le monde des possibles s’ouvre lors de mon entrée à l’ENSAL, et n’a cessé de promettre un lendemain toujours différent : entre éclats de joies et peur, appréhension et acquisition d’assurance, découverte et surprise, l’architecture dévoile son long manteau d’écume. Persistant, il m’offre une nouvelle façon de voir le monde, singulière ; une clé, qui a changé ma manière de voyager, de flâner, de m’intéresser. Il nous guide depuis les charrettes en suspens, jusqu’à l’extase des road-trips improvisés, puis dans cette marée nouvelle, le master, nous emmenant à la dérive, à la découverte d’un positionnement personnel, enfoui en nous. Telle la houle qui avance et se retire, nous tâtonnons, ensemble, vers l’apprentissage exigeant de cette discipline. Ce Nous, restera par ailleurs la vague la plus entraînante de cette marée : merci à vous, amis qui vous reconnaîtrez, ma famille, ma mère, pour la force mentale, le soutien sans faille et les moments partagés qui ont rendu ce voyage unique. III “Pleines eaux. Le soleil descend […] Un court instant, la mer est rose d’un côté, bleue de l’autre. […] des centaines de marsouins surgissent des eaux […] Eux partis, c’est le silence et l’angoisse des eaux primitives”, et celle de la page blanche, de la fin de cinq années passées ensemble, de la plongée vers le monde professionnel, qui habite cette ultime année d’école. En émerge néanmoins ce PFE, tourmenté, accidenté, tiraillé en tous sens. À chaque répit, il apostrophe autant qu’il peut les paillettes multicolores patiemment accumulées : celles, rosées du plaisir d’approfondir un sujet patrimonial qui m’est propre, ou celles, bleutées d’apaisement de trouver refuge dans un paysage qui m’est cher, celui de la Mer de ma Normandie natale. Parfois, il prend un envol glissant, assouvissant une soif d’inconnu, d’apprentissage : la découverte de l’archéologie sous-marine, la rencontre d’acteurs réels, que je remercie pour leurs apports (C. Sauvage et son équipe du DRASSM, M. Khelfaoui, propriétaire du Fort). IV “Un matin, enfin, nous relâchons dans une baie pleine d’un étrange silence […] Le soir venu, sous le ciel qui verdit et recule, la mer, si calme pourtant, s’apaise encore. […] Il ne reste qu’un espace, offert au voyageur immobile”. Un espace offert à nous, jeunes diplômés, qui nous aventurons pour une nouvelle journée en eaux inconnues et imprévisibles. Un espace qu’il nous reste encore à définir, pour certains. Un espace prometteur, brillant de ses multiples facettes, jusqu’à son horizon lointain. |