Yuan-Mei Kan, Anna-Andréa Obé-GervaisLAURÉATES DU PRIX DE LA JEUNE ARCHITECTURE DE LA VILLE DE LYON - CATÉGORIE ARCHITECTURE ALTERNATIVE, STRATÉGIES ET PRATIQUES ÉMERGENTES
Nous sommes de cultures différentes - taïwanaise et française. Nous étions dans le même studio en master 1 et avons décidé de travailler ensemble après un rendu intermédiaire. L’une ne comprenait pas les outils informatiques et l’autre apprenait encore le français. Mais nous avions des idées convergentes sur la beauté. Nous voulions faire de l’architecture qui bouge et nous nous sommes mises à plier du papier, sans relâche et sans plan. Nous nous sommes reconnues dans l’image d’une vague puissante et d’une vieille dame qui cache son sourire derrière sa main ridée. Nous avons eu confiance en cette énergie éternelle et cette espièglerie de sage. YM \ J’ai fait des études en architecture car je suis intéressée par la logique, la conception de l’espace et la culture. Quand j’ai commencé, j’ai trouvé que ça permettait aussi de mieux connaître d’autres domaines. On peut comprendre la gestion d’une bibliothèque à travers le projet d’une bibliothèque, les pédagogies pour jeunes enfants à travers le projet d’une crèche. C’est pour ça que j’ai continué. AA \ J’ai toujours eu besoin de faire le tour des lieux que je visite, même chez les gens, je veux savoir comment les pièces sont disposées. Après, j’ai voulu moi-même les organiser, je dessinais des plans et je construisais des cabanes provisoires quand j’étais petite. YM \ Encore aujourd’hui, je n’arrive pas à croire qu’on ait réussi à terminer notre projet de fin d’études. On a passé plein de moments difficiles pendant un an et demi. Tous prennent de l’importance maintenant : quand on a collecté euro par euro le budget pour réaliser notre projet, quand on a découpé chaque morceau de tissu, quand on a mis chaque oeillet sur chaque module, quand on a suspendu tous les éléments pièce par pièce, et quand on les a ensuite démontés, un par un, puis quand on attendait notre tour de soutenance de PFE en dehors de la salle. Un moment mémorable fut le moment où avec Églantine Bigot-Doll, notre directrice d’études, nous nous sommes retrouvées toutes les trois sous notre projet, La Source, et que nous avons vu l’eau couler goutte par goutte, traverser les couches filtrantes pour la première fois. AA \ Les moments qui m’ont marqués sont les premiers jours de master. Églantine Bigot-Doll nous avait donné du matériel, une consigne et trois jours pour créer. Ensuite tout s’est enchaîné. Il y a eu un moment de calme au milieu de la tempête, un jour où nous étions en train de faire des noeuds. Nous nous sommes senties comme des pêcheurs qui réparent leurs filets. À ce moment-là, le stress du projet s’est effacé. YM \ Depuis le diplôme, j’ai commencé à travailler. Je veux apprendre la méthodologie des architectes d’aujourd’hui pour réaliser des projets. Je veux aussi travailler avec les autres acteurs de façon concrète : les économistes, les bureaux d’étude, les bureaux de contrôle. Je vais passer l’habilitation à la maîtrise d’oeuvre en son nom propre, mais ce n’est pas le plus important pour moi aujourd’hui. AA \ J’aimerais passer mon habilitation à la maîtrise d’oeuvre en son nom propre et pouvoir faire du chantier rapidement. Je ne sais pas quelle est vraiment la place de l’architecte sur le chantier mais c’est là que je veux être ! |